Jacques Violet* avait choisi le bon côté de l’appareil photo. Celui qui montre le monde à ses contemporains et aux générations futures en immortalisant des moments importants, des personnages illustres, des paysages et des lieux jusqu’alors seulement imaginés. L’homme, né à Paris en 1936, a vécu en Berry, du côté de Pellevoisin où il vivait une retraite paisible après avoir sillonné le monde tout au long d’une carrière bien remplie.
Après des études artistiques à l’Ecole des arts appliqués et des débuts comme peintre au Muséum d’histoire naturelle, c'est vers la photo qu'il se tourne dans les années 60 en Afrique. A son retour en France en 1968, il intègre de grosses agences de presse (dont la prestigieuse agence Gamma).
Il couvre ainsi la Guerre des Six jours, dont les échos entrent encore en résonnance avec la triste actualité d’aujourd’hui au Proche-Orient, des voyages présidentiels de Georges Pompidou et Valéry Giscard d’Estaing au Maroc ou en Afrique noire.
Il rencontre des artistes (Yves Saint-Laurent, César, Salvador Dali, Hervé Bazin, Jacques Dutronc, Louis Malle, Rudolf Noureïev…) ou des sportifs de renom (Raymond Kopa…) dont il tire des portraits uniques grâce à sa capacité tout aussi exceptionnelle « à travailler dans l’urgence » avec une science consommée « de l’équilibre dans la brièveté de l’instant » selon Thomas Pey, directeur général de l’agence AKG Images qui gère les ventes pour l'édition, la presse, les professionnels des photos de Jacques Violet avec l’assentiment de Bérangère, la fille du photoreporter aujourd’hui installée dans l’Indre.
Certaines photos de Jacques Violet viennent ainsi illustrer les livres d’histoire de collège et de lycée, mais aussi les manuels de géographie, le photoreporter ayant été l’un des premiers à laisser vagabonder son regard vers les à-côtés de certains de ses reportages de commande et faire ainsi du « travel photo ».
Des clichés d’une qualité exceptionnelle
En 1981 et jusqu’aux années 2000, Jacques Violet poursuivra sa carrière au sein de la rédaction d’Antenne 2 (devenue France 2 depuis), avant de se retirer en Berry où il s’est éteint début 2021. Sa fille, Bérangère, a entrepris de garder toujours vif le souvenir de son talent en s’installant dans la petite maison qui accueillit ses vieux jours.
Ancienne attachée de presse dans le monde de la mode, de la beauté et du cinéma (elle a notamment organisé de gros événements lors de plusieurs éditions du Festival de Cannes) avant de bifurquer vers la restauration à Paris puis en Martinique d’où sa mère était originaire, Bérangère a redécouvert au décès de son père l’extraordinaire fonds de photos qu’il laissait derrière lui. « S’installer à Pellevoisin à 48 ans, dans sa maison, c’était un peu un moyen de garder mon disparu avec moi. C’est en regardant dans ses cartons que j’ai pris conscience de la profusion de ses clichés et leur très grande qualité » avoue celle qui s’est alors reconvertie à partir d’août 2021 dans le métier d’encadreuse, dont elle exerce officiellement la profession depuis mars 2022 et pour laquelle elle a entamé quelques collaborations avec des artistes comme l’aquarelliste Virginie Despax, le peintre Jean-Marc Le Bruman (tableau ci-dessous) et le… photographe orléanais David Templier.
En parallèle de cette activité artisanale, Bérangère a créé la Galerie Violet, société qui travaille de concert avec la galerie Taylor (basée dans le 10e arrondissement de Paris) pour vendre des photos aux collectionneurs et aux particuliers.
Des expositions qui font l’événement
En juin dernier, une partie des œuvres de Jacques Violet a eu les honneurs d’une exposition à l’occasion de l’édition du Centenaire des 24 Heures du Mans, après qu’elle a démarché la mairie sarthoise. Parce que Jacques Violet était un photographe multi-cartes, capable de saisir aussi bien des moments de vie que de couvrir une épreuve sportive telle que les 24 Heures automobiles où apparaissait alors un certain Steve Mc Queen. On lui doit des clichés iconiques de la vedette américaine en bord de piste lors de la mythique édition de 1970 qui a servi de décor grandeur nature au film Le Mans sorti en 1971. Accrochée dans l’espace culturel Gambetta en centre-ville, L’exposition « Jacques Violet 1970 – Le Mans 1970 - 24 heures en 24 poses argentiques » (une époque où le droit à l’erreur n’était pas possible, ce que le numérique a aboli) a remporté un joli succès, confortant de fait le travail de mémoire réalisé par Bérangère.
Une nouvelle exposition, d’un genre un peu différent, met actuellement en valeur le coup d’œil de Jacques Violet, du côté de la médiathèque d’Ardentes. Il s’agit de l’exposition Hybridation où les clichés pris par le photographe au Mali, au Niger, en pays Dogon, en 1973 et soigneusement sélectionnés par Bérangère se confrontent et se mêlent aux œuvres du plasticien Santana Alcala, qui retravaille les photos de son illustre prédécesseur à l'aide de différentes techniques (enduis, collage, peinture) et créé une nouvelle œuvre à partir d'une œuvre existante. Ce regard décalé sur cette partie de l’Afrique de l’Ouest est visible jusqu’au 6 janvier 2024.
* à ne pas confondre avec Hélène Roger-Viollet, qui avait donné son nom à une célèbre agence de presse.