Dans le cadre d’une étude nationale « Industrie et Territoires », Bpifrance Le Lab, en partenariat avec la Banque des Territoires, a souhaité mettre en lumière des territoires dont le développement s’est structuré autour de l’activité industrielle. À la suite de cette étude, le bassin d'emplois de Châteauroux a été retenu comme étant « un territoire à haut potentiel industriel », comme cinq autres territoires en France Métropolitaine.
Bpifrance a décidé d’y organiser une journée Avenir Industrie, dont l'objectif est d’ancrer les résultats dans la réalité économique et sociale pour comprendre concrètement comment l’industrie se réinvente dans cette zone d’emploi qui englobe l’Indre et les territoires les plus limitrophes. Cette démarche, qui inclut l’implication des partenaires institutionnels, des entreprises et de la société civile, a également pour objectif d'identifier les facteurs clés de succès à mettre en œuvre pour lever les freins de la réindustrialisation, tout en tenant compte des spécificités locales. Si la réindustrialisation est un enjeu de souveraineté nationale, elle commence en premier lieu en local quel que soit le type d’activités qu’il abrite.
Cette journée a commencé avec la restitution par Bpifrance Le Lab de cette étude nationale qui a concerné 2 800 industriels, avec un focus sur le bassin d’emploi indrien. « À l’avenir, avec les nouvelles contraintes règlementaires comme la loi Zéro artificialisation nette (ZAN) de juillet 2023, l’industrie ne pourra plus choisir où elle va pouvoir s’installer. La nouvelle donne territoriale sera là où il y a de la place et là où les collectivités et les habitants les accepteront. L’exemple d’Ozans sur l’agglomération de Châteauroux démontre ainsi un gros potentiel : grandes surfaces disponibles, infrastructures intéressantes à proximité (aéroport, autoroute, ligne POLT), un tissu déjà empreint par l’industrie avec 18 % d’emplois industriels sur ce territoire contre 15 % au niveau national et des capitaux humains et environnementaux également favorables », ont expliqué les deux représentantes de Bpifrance Le Lab. « Au niveau de l’acceptabilité sociale de l’industrie, là encore, on a pu constater un gros attachement des habitants de ce bassin d’emploi à ce type d’entreprises, même s’ils avaient une perspective un peu faussée de son impact actuel considéré comme en recul. »
Pour François Bonneau, président du Conseil régional, le Berry est dans son ensemble une terre d’industrie au sein d’une région elle-même très industrielle. « C’est une terre qui a une mémoire. L’industrie, c’est des projets, mais c’est aussi une tradition. Il n’y a pas de vision possible vers laquelle embarquer les jeunes générations s’il n’y a pas d’histoire préalable ». Nicolas Dufourcq, Directeur général de Bpifrance, a pour sa part souligné que la réindustrialisation avait déjà démarré en France, même si c’est « de façon lente ». « Il faudra beaucoup d’emplois, beaucoup d’énergie, beaucoup de foncier, beaucoup d’écoles d’ingénieurs… Beaucoup de tout pour réussir le pari ambitieux d’atteindre les 12 % de valeur ajoutée industrielle d’ici une dizaine d’années… Ces prérequis vers une réindustrialisation de toute la France, nous les finançons en grande partie à Bpifrance. »
Guillaume Basset, Directeur général délégué adjoint, Directeur de l’Attractivité des Territoires à Business France, a interpellé l’ensemble des édiles, des chefs d’entreprise et représentants d’organisations patronales, à se saisir de la consultation publique lancée par RTE sur son schéma décennal de développement du réseau, pour que le bassin d’emploi indrien fasse partie des prochaines dessertes en nouvelles lignes électriques à très haute tension. Ceci afin de permettre à des zones comme Ozans de pouvoir postuler à l’accueil de « gigafactories » très énergivores et nécessitant au moins deux sources d’approvisionnement en électricité pour pouvoir s’installer. Le représentant de Business France se voulait toutefois résolument optimiste en rappelant que « l’attractivité de la Région Centre-Val de Loire se portait bien, malgré des vents contraires, avec 62 projets étrangers accueillis en 2023 et un cap maintenu en 2024 » et qu’il avait « bon espoir que la zone d’Ozans se développe bientôt ». Des efforts devront cependant être faits pour inciter les pouvoirs publics à réduire de moitié les temps de latence administrative pour favoriser la réindustrialisation du territoire.
Sophie Ferracci, Directrice de la Banque des Territoires, a rappelé l’ensemble des actions menées par son organisme tant en faveur du foncier que de la formation, en passant par l’immobilier industriel en citant des projets comme la réhabilitation de l’ancien site Mellottée.
Avant que les chefs d’entreprise ne viennent sur scène pour débattre, François Jolivet a pointé du doigt deux sujets importants inhérents à la volonté partagée par l’ensemble des participants de réindustrialiser le territoire : celui du logement des futures forces vives attirées par ces emplois nouveaux – « sans beaux logements du XXIe siècle, elles ne viendront pas » - et l’obligation de ne pas négliger le développement économique endogène en ne pensant qu’à l’exogène. « On a besoin de se réindustrialiser certes, mais il ne faut pas non plus se désindustrialiser, ce qui peut aller vite », a précisé le Député de la 1ère circonscription de l’Indre.
Vint alors le moment de la table ronde sur le développement industriel futur de l’Indre, avec Laurence Rolland (RBH Industrie), Laure Catoire-Boisse (Catoire-Semi), Tristan de Witte (Roger-Pradier, groupe Rivalen), Hervé Plessix (Stéarinerie Dubois) et Jean-François Riolland (Groupe Riolland). Si tous ont insisté sur la facilité des échanges avec les collectivités, les chambres consulaires et les accélérateurs de projets qui, malgré les divergences politiques, font front commun en matière de développement économique, il reste beaucoup à faire pour attirer de nouveaux salariés vers l’industrie. « On ne préparera pas demain en faisant plus la même chose. Il y a un grand besoin de se renouveler. Demain, on ne parlera plus de métiers, mais de socles de compétences. Comment attirer les jeunes vers nos entreprises et les industries qui s’implanteront ? Nous évoluons dans un secteur d’activité qui souffre à tort d’une image négative, entre la Petite Fadette et Germinal, sur un territoire qui n’a pas d’image lui-même » a concédé Laure Catoire-Boisse. « Les jeunes d’aujourd’hui n’ayant plus les mêmes prismes que nous, les chefs d’entreprise, il faut que l’on fasse preuve de plus de transversalité entre nous, que l’on travaille plus les uns avec les autres pour assurer la pérennité des savoir-faire existants dans le département et attirer de nouvelles industries », a renchéri Laurence Rolland.
L’après-midi a ensuite été consacré à divers ateliers en groupes séparés, autour des solutions pour booster la réindustrialisation de l’Indre, pour dynamiser un nouvel écosystème territorial et pour insister sur les bienfaits de l’innovation en territoire rural.